Dictature de l’urgence et recentrage flash

Foule de piétons pressés dans un lieu publicPeut-être connaissez-vous la dictature de l’urgence : ce sentiment que vous êtes piloté.e par une pression à faire vite, à courir dans votre journée. Une obligation à traiter les notifications et messages dès qu’ils arrivent. Quand tout va plus vite, l’organisme humain est mis à mal. Stress, fatigue, épuisement… Quelles clés pour comprendre l’accélération que vit notre société ? Comment vivre l’urgence ?

Notre cercle de coachs a encore frappé, cette fois il a frappé le bol tibétain pour faire résonner le temps, un temps centré qui échappe à l’urgence. Car le thème de cette rencontre était la dictature de l’urgence et une possible réponse, le recentrage.

Rencontre du mardi 19/06/2012
« Dictature de l’urgence et recentrage flash »
Participants :  Edouard Stacke, Karine Aubry, Grégoire Jacquiau-Chamski, Agnès Overli, Laure Galvez et Catherine Viasnoff

Avant de commencer… Sonnez le bol tibétain

Introduction

Dans notre quotidien, il est souvent difficile de distinguer l’urgence de l’importance, car paradoxalement, pour le faire, il faut… du temps ! Si tout est urgent, alors rien n’est important ; et s’ensuit une épreuve de souffrance digne de Sisyphe remontant constamment son rocher en haut de la montagne pour le voir immédiatement retomber de l’autre côté.

Nos clients nous demandent parfois (souvent !) de les aider par le coaching à être plus efficaces, pour assurer face à l’urgence. « Aidez-moi à aller vite ! » Mais le rôle du coach est de ne pas céder à l’urgence de son client. Plus celui-ci est pressé, plus le coach se doit d’habiter pleinement le présent pour inscrire la relation de travail dans le « ici et maintenant ». Une minute peut filer à la vitesse de la lumière comme elle peut se révéler interminable car le temps est une expérience éminemment subjective. Le temps de la relation a le goût de l’éternité : pour chacun d’entre nous, il est urgent de réapprendre à se sentir vibrer et à laisser la vibration se prolonger en soi pour accueillir l’autre dans l’espace-temps du présent continu. Car c’est évidemment en « perdant du temps » (jugement de la société) que l’on en gagne (sérénité).

Problématique

L’urgence, cette nécessité d’agir rapidement, semble avoir envahi notre mode de vie. Systémique, elle nous contraint à agir ou décider immédiatement : répondre aux emails dans la minute, envoyer une offre commerciale le jour-même, livrer un produit dans un délai record.

Une plaisanterie souvent entendue à propos du délai imposé par le client :

– Et pour quand le veut-il ?
– Comme d’habitude, c’est pour hier !

Les délais donnés sont si courts qu’ils en deviennent presque négatifs ! Notre folie de l’urgence tourne à l’absurde.

L’accélération que nous percevons semble liée à la complexité et la dictature de l’urgence. C’est une question à la fois personnelle et sociétale : il y a une agitation sociale, et la réaction de chacun d’entre nous à cette urgence. Celui qui prend du recul a le sentiment d’assister à une fuite en avant collective.

1/ D’abord, l’urgence demande de faire plus en moins de temps.

Loin d’un modèle où l’hyper-efficacité libèrerait un espace pour l’inactivité, il s’agit de passer d’une tâche à l’autre : les urgences se succèdent.

Réflexion entendue chez un cadre en entreprise : « j’ai un métier d’urgentiste ».

Derrière il y a la notion d’urgence il y a celle de gravité. D’où vient cette inflation sur les conséquences d’une action trop lente ? Impatience irrationnelle ? Angoisse collective ?

2/ Ensuite, l’injonction de faire vite ne dispense pas pour autant de faire bien. Et « Fais vite » et « Fais bien » juxtaposés évoquent une double contrainte.

Comment savoir gérer rapidité d’exécution et complexité d’action? C’est la question de la raplexité .

3/ Un troisième aspect de l’urgence, c’est l’exigence de réponse immédiate.

Les managers témoignent d’une évolution ces dernières années : leur disponibilité pour l’entreprise hors des heures de travail s’est accrue (jusqu’à plusieurs heures par semaine selon les dernières études). Connectés 24h/24, ces cadres acquièrent et donnent de nouvelles habitudes : l’hyperdisponibilité donc l’hyper-réactivité deviennent la norme.

« Tu as lu mon email ? » interroge le collègue qui accourt dans votre bureau… avant même que son message ne vous soit parvenu.

Insidieuse culture du tout-de-suite qui rend les managers et leurs équipes corvéables à merci. L’on dit de moins en moins « ça attendra lundi », on dit aux proches « je réponds juste à un message vite fait». Ce fonctionnement engendre une part de souffrance en entreprise… et dans la vie privée.

« Ça ne peut pas attendre lundi ? (…) Non ? Bon, je m’en occupe. »

D’où vient cette exigence d’hyper-réactivité ? Est-ce la nouvelle habitude de l’information en temps réel, érigée en norme par les nouvelles technologies et leurs usages ? Que faisons-nous de ce reporting en continu et de ce déluge de chiffres ?

« Dans mon expérience de l’entreprise (d’une certaine entreprise) il n’y avait aucune profondeur dans la perspective du temps. Les chiffres étaient donnés heure par heure, sans recul. »

4/ Face à ce mouvement de fond, deux questions :

a) Cette tendance est-elle irréversible ?

L’accélération imprimée par les technologies de l’information et de la communication connaîtra-t-elle un palier ? Ou un déclin ?
Les usages suivent voire précèdent les possibilités techniques : Twitter a détrôné CNN comme source d’information la plus rapide au monde. Or l’information sur Twitter, c’est vous, c’est nous qui la diffusons. Nous créons ces ondes de choc fulgurantes, répliques des soubresauts du globe. Tout savoir, plus vite !

b) Jusqu’où pouvons-nous aller dans l’hyper-réactivité ?

Charlie Chaplin aux prises avec la cadence de la machine - Les Temps Modernes

A l’image de ces robots qui passent des ordres en bourse plus vite que les humains, allons-nous muter ? Sommes-nous capables d’aller au-delà ? Allons-nous passer le mur du son ?

Une question d’échelle se pose : l’humain peut-il réagir aussi vite que la machine, et tenir ce rythme aussi longtemps ? Dans Les Temps Modernes (1936) déjà,  Charlie Chaplin tente de suivre la cadence d’une chaîne de montage.

Pourtant la nouvelle génération semble parfois adaptée à ce rythme, à l’image des adolescents qui répondent aux SMS plus vite que l’éclair.

S’adapter, subir, contourner, réagir ? Voici quelques pistes.

Pistes de réflexion

Même pris par l’emballement du système, chacun est responsable de sa propre réaction à l’urgence.

Certains s’y adaptent avec facilité, car elle résonne avec leur rythme naturel. D’autres lui résistent : à l’injonction « dépêche-toi » ils répondent en ralentissant, dans le choix délibéré de leur rythme naturel. D’autres encore lui échappent se rendant étanches à sa dictature.

Comment être acteur et non victime du temps social qui s’accélère ?

Quelques pistes :

1 – Prendre conscience

Prendre conscience, car la plupart des personnes subissent cette accélération inconsciemment, et tombent dans les pièges de la perception (« je n’ai pas le choix »). Beaucoup se sur-adaptent à l’urgence, jusqu’à la souffrance, comme ces managers qui subissent des délais très courts et s’y adaptent en « faisant la mule ».
La prise de conscience, c’est réaliser que l’urgence est toxique, pas écologique, et de plus, souvent injustifiée.

2 – Explorer d’autres rapports au temps

Il s’agit d’un enjeu culturel. Par exemple :
– au Japon on est centré sur le présent, avec un temps circulaire
– en Europe on est centré sur le passé et le futur, avec un temps linéaire
L’urgence, c’est la vitesse du Chronos qui file, et c’est n’être jamais dans le présent.

Comment passer du Chronos, temps linéaire, au Kairos (bon moment pour agir), la profondeur dans l’instant ?

3 – Se recentrer

Le recentrage, voilà une clé qui nous semble essentielle en réponse à l’urgence qui nous disperse.
Une image : celle d’une eau trouble et agitée, que l’on parvient à laisser reposer, de sorte qu’un dépôt se détache nettement au fond.
Le recentrage nous paraît important quand on est bousculé : se réaligner avec ce qui est important pour soi, obéir à sa temporalité à soi et non celle de l’environnement. Le coach dans sa posture, sait s’aligner et réaligner son client. En entreprise, le recentrage remet les priorités au centre, quand l’urgent avait phagocyté l’important.
Savoir se centrer en toute circonstance, c’est une posture et une façon d’être au monde : un art de passer du Chronos au Kairos. Comment s’y prendre ?

3 axes pour se recentrer :

a) Le Son
La résonnance d’un bol tibétain en 7 métaux, ou de cloches aide à se recentrer car le son attrape l’esprit qui se libère alors des pensées automatiques.

b) La Respiration
Ralentir notre respiration entraîne une modification biologique.
Proposition d’exercice : faire 3 grandes respirations en suivant la main du guide qui monte (inspire) et descend (expire) très lentement. Faire cet exercice en le dédramatisant, permet au hamster d’arrêter de tourner dans sa roue (pensées automatiques).

c) Le Silence
Le bruit est lié à l’agitation, il devient une habitude et aujourd’hui le silence peut angoisser. Pourtant, il aide à se recentrer.

4 – Choisir de ralentir

En réaction à l’urgence, certains choisissent le « Slow Life » ou « snailing », une forme de discipline (ex : se limiter à deux consultations des emails / jour). Dans cet esprit, le tai chi consiste à ralentir les mouvements.

Pour ralentir, quelques propositions ont été partagées par notre Cercle de coachs :

a) L’exercice des 3 céréales
Il s’agit de méditer sur 3 céréales posées dans sa main, durant 5 minutes.
Une personne peut guider le méditant, en interrogeant ses 5 sens sur ce qu’ils perçoivent de la céréale. Voilà une forme de rituel à intégrer dans sa vie pour ralentir.
mise à jour février 2020 : Pour aller plus loin dans ce type d’approche, regardez du côté du protocole MBSR, Mindfulness Based Stress Reduction, qui est enseigné partout dans le monde et notamment en France.

b) La méditation
Plus largement, la méditation aide à ralentir. Les arts martiaux disent : méditer puis agir, ce qui revient à ralentir en se détachant du Chronos et à agir selon le Kairos, le moment juste.

c) Déconnecter, quitter les outils, les notifications, pour se concentrer quelques instants ou plus sur son corps : se connecter à soi-même.

d) Apprendre à aller vite sans être pressé, à la manière d’un Charlie Parker qui, lorsqu’il joue à des tempi impossibles des thèmes comme Anthropology semble pourtant prendre tout son temps, car tout dépend des repères. Ce n’est pas le musicien qui suit le tempo, c’est le musicien qui fait du tempo un allié. Compter à la double croche peut rendre fou quand le tempo s’accélère ; mais se repérer à la noire ou à la blanche de la ligne de basse ou de la batterie permet de ne pas être pris dans l’accélération mais de rester ancré dans la pulsation. Tout est affaire de perception : le pianiste Jacky Terrasson expliquait lors d’une Master class au festival de jazz de Marciac que s’il se sentait si à l’aise de jouer à 180km/h en concert, c’est parce qu’auparavant il s’était entraîné chez lui à passer les virages à 220km/h.

e) S’offrir un Temps de Qualité en sortant de son activité frénétique pour goûter un temps long, seul ou à deux. Où est votre « Quality time » dans votre vie personnelle, professionnelle ? Quels sont les moments que vous vous offrez ? Il faut écouter John Pizzarelli chanter en duo ce « Quality time »  et son clin d’œil jazzistique aux parasites du téléphone portable.

Synthèse rédigée par Karine Aubry avec la collaboration de Grégoire Jacquiau-Chamski.

Que puis-je pour vous ?

Le coaching est l’occasion de revisiter nos fonctionnements et de tester de nouvelles stratégies : sortir de l’automatisme.
Vous vous sentez sous pression, pris dans une urgence permanente,
vous cavalez comme le lapin d’Alice au Pays des Merveilles,
et vous ne voyez pas comment faire autrement ? Je peux vous aider !
Parlons-en et voyons comment mon accompagnement peut répondre à vos besoins.

Prolonger

Si vous avez encore du temps, voici quelques articles et ouvrages sur l’urgence :

– « Comment l’urgent occulte l’important », interview d’Hartmut Rosa dans les Cahiers d’un Monde qui Bouge, fév. 2011

– « Où l’on reparle de l’urgence« , par Guillaume Louriais

« Trop de décalage entre les vraies urgences et la pression de l’urgence », article l’Entreprise, 31 mai 2012

– « Montons sur le balcon, un slam d’entreprise » par SanDenKR à l’occasion d’une journée de réflexion organisée par SciencesPo sur « Entreprises pressées, salariés sous pression : alternatives sociologiques, PAUSE » en janvier 2012

– [Livre] Harmut Rosa, Accélération, une critique sociale du temps, La Découverte, 2010
Résumé : l’expérience majeure de la modernité est celle de l’accélération. Nous le savons et l’éprouvons chaque jour : dans la société moderne, « tout devient toujours plus rapide ». Or le temps a longtemps été négligé dans les analyses des sciences sociales sur la modernité au profit des processus de rationalisation ou d’individualisation. C’est pourtant le temps et son accélération qui, aux yeux de Hartmut Rosa, permet de comprendre la dynamique de la modernité. 
Pour ce faire, il livre dans cet ouvrage une théorie de l’accélération sociale, susceptible de penser ensemble l’accélération technique (celle des transports, de la communication, etc.), l’accélération du changement social (des styles de vie, des structures familiales, des affiliations politiques et religieuses) et l’accélération du rythme de vie, qui se manifeste par une expérience de stress et de manque de temps. La modernité tardive, à partir des années 1970, connaît une formidable poussée d’accélération dans ces trois dimensions. Au point qu’elle en vient à menacer le projet même de la modernité : dissolution des attentes et des identités, sentiment d’impuissance, « détemporalisation » de l’histoire et de la vie, etc. L’auteur montre que la désynchronisation des évolutions socioéconomiques et la dissolution de l’action politique font peser une grave menace sur la possibilité même du progrès social. 
Marx et Engels affirmaient ainsi que le capitalisme contient intrinsèquement une tendance à « dissiper tout ce qui est stable et stagne ». Dans ce livre magistral, Hartmut Rosa prend toute la mesure de cette analyse pour construire une véritable « critique sociale du temps » susceptible de penser ensemble les transformations du temps, les changements sociaux et le devenir de l’individu et de son rapport au monde.

16 Commentaires

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    • Frederique sur 28 octobre 2012 à 20 h 11 min
    • Répondre

    Pour un peu de légèreté :
    Petit cahier d’exercices pour ralentir quand tout va trop vite

    Un livre qui m’a bien aidée à réfléchir il y a quelques années
    Ralentir, Travailler moins, vivre mieux de John D. Drake

    Bonne continuation.

    1. Merci Frédérique pour ce partage intéressant. Je pense que je vais l’offrir à quelqu’un pour Noël et le lui emprunter ;)

    • Gaëtan Bourgé sur 28 septembre 2012 à 11 h 50 min
    • Répondre

    Bonjour Karine,

    Peut-être une autre piste. Ne pas rester connecté 24H/24 sur ces mails, téléphone et autres réseaux sociaux. S’accorder des temps de déconnexion.

    Se prendre des rdvs avec soi-même…

    • Stacke Edouard sur 28 septembre 2012 à 9 h 09 min
    • Répondre

    Bonjour CF,

    Le japon, comme la Chine ancienne, avait une vision du temps circulaire, cyclique, comme nos anciennes sociétés rurales, qui vivaient au rythme des saisons, qui reviennent année après année. C’est le mythe de l’éternel retour. Les choses naissent, grandissent, arrivent à maturité, déclinet et meurent. C’est vrais pour les humains et les sociétés. Rien n’est stable, tout est mouvement permanent, seul l’instant présent existe, le passé et l’avenir sont des constructions mentales..
    L’occident a une vision linéaire du temps, où le présent n’existe pas, car infinitésimal et on se déplace du passé vers l’avenir, avec souvent, sous-jacente, la notion d’aller des ténèbres vers la lumière, comme si l’avenir était forément mieux et que le progrès aussi est linéaire. C’est très théorique et la vie de marche pas réellement comme çà, mais nous avons tendance à entretenir cette illusion. En acceptant notre finitude, nous pouvons davantage nous ouvrir au monde du vivant, aux adaptations permanentes et abandonner les crispations pour s’accrocher à nos acquis, en bougeant avec le monde.
    Edouard

    • Carine sur 27 septembre 2012 à 19 h 29 min
    • Répondre

    Bonjour

    à mon avis, un des problèmes de l’urgence est que ça peut devenir une sorte de dépendance, une espèce de course à l’adrénaline où on cherche à empiler le plus de choses possibles en un un minimum de temps pour sentir qu’il se passe quelque chose. Quitte des fois à laisser trainer les choses pour les gérer à la dernière minute. Je me souviens qu’on m’ait dit à l’école en « gestion du temps » la petite phrase « ce qui est urgent est en retard depuis longtemps ».

    La réponse immédiate n’est pas forcément un mal en soi quand il s’agit d’être capable de répondre à un aléa. Pour le gérer avec un minimum de stress, il faut l’avoir anticipé (plans d’organisation des secours, de continuation d’activité, etc).
    Par contre, je partage complètement ton point de vue sur la perversité et l’inanité du reporting continu, où l’analyse disparait au profit d’un torrent de chiffre. J’ai l’impression que cela se croise surtout chez les micro-managers.

      • Karine sur 1 octobre 2012 à 15 h 19 min
      • Répondre

      Bonjour Carine

      Merci de ton commentaire. Je te rejoins sur cette forme de dépendance à l’urgence, au-delà de l’absence de conscience de nos fonctionnements face à l’urgence.
      Peur du vide ?

      Par ailleurs comme tu le dis savoir gérer l’urgence est une compétence intéressante. Il me semble que les urgentistes et autres pompiers la vivent non dans la précipitation, mais tels des Charlie Parker, dans le calme de double-croches parfaitement maîtrisées. Chacun son métier, le cadre qui se prend pour un pompier « paye » de le faire dans le désordre et la précipitation.

      Je n’avais pas fait le lien entre passion du reporting continu et micro-managers, mais maintenant que tu le dis, cela va souvent ensemble !

        • Carine sur 1 octobre 2012 à 20 h 41 min
        • Répondre

        Peur du vide, peur de l’ennui. Et si j’ai tout fait aujourd’hui, que vais je faire demain ? Je procrastine un peu aujourd’hui, et je me génère de l’urgence demain.
        Je crois que l’on valorise plus l’effort que l’économie de ses ressources, et qu’agir dans l’urgence, c’est un peu se prendre pour Zorro ou le super_héros du moment. Et puis, brasser de l’air permet de se faire remarquer, plus que tenir sa cadence sans faire de vagues.

        D’un autre côté, certains managers pensent que le sentiment d’urgence est nécessaire à la mobilisation des équipes, et en abusent. Ils oublient au passage les pertes de créativité, le manque de recul et le stress associés. Ou bien étant eux mêmes incapables d’une réflexion de fond, ils sur-réagissent en sautillant d’un problème immédiat à l’autre, pour montrer qu’ils sont bien là, empêchant au passage leurs équipes de traiter ces mêmes problèmes.

          • Karine sur 2 octobre 2012 à 19 h 00 min
          • Répondre

          Merci Carine d’avoir ainsi dépeint quelques aspects majeurs de l’urgence en entreprise. L’urgence-misesoustension, l’urgence-occupationdeterrain, l’urgence-superhéros…
          Comment être présent et efficient simplement, sans agiter de gyrophare ?

    • CF sur 25 septembre 2012 à 21 h 08 min
    • Répondre

    Un autre exemple tiré de la pratique musicale : quand il rencontre une série de double-croches, le débutant accélère le tempo. C’est typique ! Il sait que la difficulté est à cet endroit-là du morceau et qu’il va devoir jouer un peu plus vite. Il a peut-être envie d’en finir, et vite ? Résultat : des mesures toutes bousculées !
    Et puis le débutant apprend qu’il faut faire comme s’il avait le temps… tout son temps…
    Ce qui est, littéralement, le cas ;)

    Si vous avez des précisions sur le « temps circulaire » japonais, cela m’intéresse !

    1. Bonjour,
      Merci de ce complément très intéressant sur les double-croches, c’est très parlant.
      Pour le temps circulaire japonais, je sollicite notre ami Edouard qui en sait plus que moi.
      A bientôt,
      Karine

    • Charles sur 25 septembre 2012 à 19 h 28 min
    • Répondre

    Tellement vrai, tellement d’actualité…faudrait faire lire ça a tous les étages du management. Super article

    1. Bonjour Charles

      Merci beaucoup ! Je l’afficherais bien aux péages des autoroutes aussi ;)

    • Rémi sur 25 septembre 2012 à 10 h 18 min
    • Répondre

    Merci Karine pour cet article très clair qui traite d’un sujet essentiel : le rapport au temps et ses dérives dans notre société actuelle

    Pas plus tard qu’hier, un fait a illustré cet urgence, au plus haut sommet de l’état : hier soir, on apprenait que des messages privés sur Facebook étaient rendus visibles de tous. Certains crient au bug monumental. Facebook dément. Ce matin, le gouvernement a annoncé demander des comptes à Facebook et à la CNIL. Rapide comme réaction…. D’autant plus que l’on n’est pas sûr que ce soit un bug, et ce serait peut-être des messages anciens, qui étaient visibles auparavant.
    Enfin bref, cela pose un problème de crédibilité des décideurs qui dégainent plus vite que leur ombre pour communiquer.

    Pour ma part, j’ai quitté, il y a un an, le monde de la grande entreprise où régnait une atmosphère d’urgence. Le projet à rendre pour hier, j’ai connu… Cela me stressait en continu et j’avais l’impression de toujours travailler à l’arrache. Jamais le temps de faire correctement les tâches, car c’était un flot continu. Et c’est tout le système qui était comme ça.
    A présent indépendant, je prends le temps de faire les choses. Je prends du plaisir et c’est moi qui décide du temps que je consacre à mes projets. Cela demande en revanche de la rigueur et de la discipline :-)

      • Karine sur 25 septembre 2012 à 12 h 51 min
      • Répondre

      Bonjour Rémi
      Merci de ton partage.
      En effet l’affaire des messages privés sur Facebook montre le rapport à l’urgence, la précipitation, l’hyper-réactivité dont nos dirigeants font parfois preuve.
      J’ai le sentiment que souvent, le dossier tombe rapidement dans l’oubli, comme si ce qui comptait c’était d’avoir réagi vite sur le coup, et de l’avoir montré.

      Ainsi tu as choisi de choisir ton temps, c’est une option pour ceux qui ne se sentent plus en accord avec l’urgence imposée au travail. Es-tu encore parfois confronté à l’urgence ? La vis-tu alors différemment ? Et est-ce que ta perception de l’urgence manifestée par d’autres que toi, a changé ?

        • Rémi sur 25 septembre 2012 à 14 h 48 min
        • Répondre

        Ce sont des questions inspirantes que tu me poses ;-)

        Je ne suis pratiquement plus confronté à l’urgence, sauf quand c’est moi qui me la mets. Car j’ai redéfini la notion d’urgence. J’ai pris conscience que peu de choses relève réellement de l’urgence : quand il y a question de vie ou de mort, ou quand le fait de ne pas agir va avoir de grandes conséquences pour plus tard. Pour tout le reste, on peut prendre le temps pour réfléchir et agir.

        La conséquence directe de ce recentrage sur l’essentiel, c’est une sensation pour moi d’avoir le TEMPS DE VIVRE. Et ça c’est bon !

        Un autre exemple : mon téléphone portable est quasiment toujours éteint quand je me déplace (dans la rue, dans les transports…) pour me préserver des ondes électromagnétiques, car mon tél est contre moi dans ma poche. Beaucoup de monde me dit : « Mais comment tu fais si on t’appelle alors ? », pensant que c’est urgent de répondre quand le téléphone sonne. Je réponds simplement : « Si la personne a vraiment qqchose d’important à me dire, elle laissera un message ». Quelle tranquillité :)

        Alors quand je vois d’autres qui luttent avec l’urgence dans leur vie, et bien je me dis « Aïe, ça doit pas être facile tous les jours de courir tout le temps. Mais heureusement ça a changé pour moi ! » Et tu l’as bien décrit dans ton article, cela passe d’abord par une prise de conscience.

        1. Bonjour Rémi
          Bravo pour ton cheminement jusqu’au temps de vivre, et ton art de rester centré sur ce temps.
          Comme tu le dis, avec la prise de conscience et le recul l’agitation paraît bien vaine.

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